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›  Comment inspecter le flou. Les reconfigurations d’une mission d’évaluation d’un dispositif d’action publique français

Comment inspecter le flou. Les reconfigurations d’une mission d’évaluation d’un dispositif d’action publique français

  • Morival, Yohann (CSO – Science Po)
  • Lazarus, Jeanne (CSO – Science Po)

Abstract

Cette communication propose d’analyser les contrôleur-e-s de l’administration comme des acteurs de l’action publique en train de se faire. En contre point d’une analyse séquentielle des politiques publiques faisant de l’inspection un temps distinct de celle de la mise en place de l’action publique, nous proposons de la saisir comme constitutive de « l’action collective dans le cadre de l’État régulateur » (Hassenteufel, 2008). Nous souhaitons analyser la façon dont le cadre changeant de l’action publique rencontre la spécificité des pratiques de ces contrôleur-e-s. L’évolution de ces pratiques tient moins à une volonté de revalorisation de leur rôle par les acteurs, individuellement et collectivement, qu’à une nécessité de s’adapter à la volonté des pouvoirs publics de faire faire l’action publique par d’autres, en déléguant de nombreuses missions à de structures associatives ou parapubliques. En ce sens, les contrôleur-e-s de l’administration investissent leur prestige symbolique et des savoirs spécifiques (synthèse, mise en relation, connaissances techniques, etc.) dans la pérennisation de ces nouvelles formes d’action publique.

Cette communication s’appuie sur l’observation ethnographique d’une inspection depuis la définition de la mission jusqu’à la remise du rapport. Celle-ci est menée par deux inspecteurs appartenant à deux corps distincts d’inspection interministériels français : l’IGAS, le corps d’inspection du Ministère des Affaires sociales et le CGFI, dépendant du Ministère du Budget. Nous disposons à la fois d’entretiens réguliers, du suivi de l’évaluation ainsi que des différentes notes produites au cours de l’inspection. Le projet évalué, un dispositif de lutte contre le surendettement, étant particulièrement labile, les contrôleur-e-s de l’administration doivent à la fois négocier les contours de leurs missions, définir les critères de l’évaluation et y recourir sans trop réifier un dispositif encore mouvant. Ces diagnostics sont produits dans une autonomie relative : d’une part, ils sont constamment négociés entre des inspecteurs issus de corps différents et, d’autre part, ils doivent être acceptés par les cabinets ministériels qui sont à l’origine de la mission.

La communication se déroulera en deux temps. Dans un premier temps, nous interrogerons la capacité des contrôleur-e-s de l’administration à redéfinir leur mission et à se poser davantage comme des bâtisseurs que comme des inspecteurs. Puis, nous analyserons les compétences et les savoirs mobilisés pour figer le flou et produire un rapport commun.