Hambye P. et Siroux JL., « Travail et travailleurs dans l’enseignement en alternance » (ST 9)

Hambye P. et Siroux JL., « Travail et travailleurs dans l’enseignement en alternance » (ST 9)

Philippe Hambye (Université catholique de Louvain, Belgique) Jean-Louis Siroux (Université catholique de Louvain, Belgique)

De nombreux travaux ont montré l’importance croissante du discours qui consiste à faire de l’« employabilité » des individus une des missions prioritaires (si ce n’est la mission prioritaire) des institutions d’éducation et de formation. L’objectif de cette communication est, d’une part, d’analyser les ressorts de ce discours, et d’autre part, d’interroger son impact dans l’enseignement en alternance, où il trouve son terrain d’expression le plus abouti.

Pour saisir l’argumentaire qui permet de faire de l’employabilité un objectif légitime des politiques éducatives, nous commencerons par revenir sur la façon dont cet idéal est apparu dans le discours public, en portant une attention particulière aux conditions de l’émergence, dans les années 1980,de l’enseignement en alternance en Belgique francophone, terrain de nos observations. Nous étudierons ensuite un corpus de textes variés (articles de presse, discours politiques, littérature grise d’organismes divers, etc.) et d’entretiens avec des acteurs sociaux impliqués dans l’enseignement en alternance. Nous montrerons ainsi que le discours légitimant le rapprochement entre les champs de l’éducation et de la production est basé sur une série d’arguments qui participent à faire des « besoins des entreprises » la finalité assumée de politiques publiques.

Dans un second temps, nous confronterons le discours sur l’enseignement en alternance avec nos observations ethnographiques. Alors que de nombreux acteurs justifient l’alternance comme un dispositif de formation pertinent et efficace, la nature de ce qui se joue lors de la présence des élèves sur les lieux de stage et dans leurs relations avec les employeurs est en réalité beaucoup plus ambiguë. Tant le statut des élèves que celui de leur activité sont ainsi entourés de flou : sans être qualifiés de travailleurs, ils ne sont pas de simples élèves, ils reçoivent une rémunération qui n’est pas qualifiée de salaire, etc. Quelles sont les conséquences de cette ambiguïté sur les conditions d’emploi des élèves-stagiaires et sur les rapports de force avec les employeurs ? Plus fondamentalement, que nous apprennent les rapports de travail spécifiques au champ de l’alternance sur les transformations qui touchent la société salariale dans son ensemble ?

Section thématique 9 : Crises et réinstitutionnalisation des politiques sociales
Session unique, jeudi 10 avril 2014, 10h00-12h30