La guerre civile. Vers une redéfinition de la souveraineté

• Bouderbala, Lyess (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)

Abstract

L’objectif sera de mettre en lumière le statut particulier de la guerre civile parmi les crises politiques qui peuvent affecter un État. Nous montrerons dans quelle mesure c’est toujours parce que toute crise, qu’elle soit économique, climatique ou politique, peut déboucher sur un conflit interne violent, que tout phénomène s’écartant du cours normal du politique est nécessairement perçu comme un danger pour la stabilité étatique. C’est pourquoi, par crise nous entendons une transformation brutale mais surtout périlleuse. La crise n’est pas simplement un bouleversement violent, elle est aussi la disparition d’un équilibre, mettant ainsi en danger le corps politique.

Pour éclairer ce statut de la guerre civile nous reviendrons sur le rapport qu’elle entretient communément avec le politique. La guerre civile est toujours présentée comme l’envers du politique, ce contre quoi une association des hommes a dû être mise en place pour « sortir » d’un état de conflit incessant. Alors que la guerre externe est conforme avec l’expression d’une volonté politique, la guerre civile est nécessairement perçue comme la négation du politique. En ce sens, elle est la crise par excellence que toute souveraineté peut avoir à affronter, puisqu’elle est supposée faire ressurgir l’état de nature qu’il a été possible de quitter par l’instauration du politique.

Contre cette perspective qui refuse à la crise politique tout caractère « positif », nous défendrons, au sein du droit international, une compatibilité entre guerre civile et projet politique. Nous montrerons dans quelle mesure la guerre civile peut être maintenue au sein de la politique. Au delà de la violence qu’elle manifeste, la discorde interne exprime non pas une volonté de détruire l’association entre les hommes mais le projet de la redéfinir. En ce sens, cette crise par excellence qu’est la guerre civile peut servir à indiquer l’existence d’une souveraineté autre, irréductible à celle d’un gouvernement en place et qui oblige à repenser les rapports politiques. Cette intervention sera ainsi l’occasion de repenser le rôle de la discorde au sein des régimes démocratiques puisque du conflit peut émerger un projet politique plus représentatif et plus à même de tenir compte des divergences politiques.