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›  Entre traditions politico-culturelles et renouveau de la pensée anti-fédéraliste au Canada et aux États-Unis : les souverainetés résiduelles des États fédérés nord-américains à l’épreuve de la régionalisation

Entre traditions politico-culturelles et renouveau de la pensée anti-fédéraliste au Canada et aux États-Unis : les souverainetés résiduelles des États fédérés nord-américains à l’épreuve de la régionalisation

  • Delerue, Benoît (Université Jean Moulin Lyon 3)

Abstract

Si le fédéralisme moderne inventé par les États-Unis a redéfini le concept westphalien de souveraineté étatique, il n’a pas pour autant résolu le problème du souverainisme. Au contraire, la multiplication des niveaux de gouvernement « souverains » a intensifié les revendications autonomistes des États fédérés, tant aux États-Unis qu’au Canada, de telle façon qu’elles remettent en question la viabilité du concept de divisibilité de la souveraineté sur le long terme.

Depuis la Révolution tranquille jusqu’à la motion parlementaire de 2006 en passant par les référendums de 1980 et 1995, les indépendantistes québécois ont acquis de nouvelles compétences exclusives pour leur province, et surtout la reconnaissance de la nation québécoise au sein de l’ensemble canadien. Malgré une baisse de soutien au projet indépendantiste en particulier chez les jeunes générations, les Péquistes n’abandonnent pas tout espoir d’indépendance. La pensée souverainiste québécoise peut-elle se renouveler dans la dynamique actuelle de mondialisation ? Le modèle fédéraliste du voisin américain se confronte lui aussi à une tendance au repli conservateur : la forte polarisation bipartisane entre un « Nord » démocrate et un bloc sudiste solidement et historiquement ancrée dans l’idéologie républicaine décentralisatrice favorise-t-elle une régionalisation autour de la question de la répartition des compétences ? Depuis les années 1960, comment les arguments en faveur des droits des États ont-ils évolué ?

Grâce à des enquêtes de terrain et aux archives gouvernementales et journalistiques, nous proposons une réflexion autour des mouvements « autonomistes » nord-américains dont les cultures politiques semblent s’orienter vers le régionalisme en faveur d’un fédéralisme éloigné du Fédéral. Toutefois, nous verrons que cette tendance ne semble pas affecter seulement un « néo-Solid South » américain et une nation québécoise, mais s’ouvre à d’autres orientations autonomistes (sans être nécessairement indépendantistes), comme le témoignent le Mouvement des droits maritimes des années 1920 et la coopération des provinces atlantiques depuis les années 1950, à tel point qu’une unification régionale a déjà été évoquée. Finalement, entre repli « identitaire » et coopération économique, les États fédérés nord-américains entendent préserver leurs souverainetés sur le fondement de leurs cultures politiques particulières, dans une logique centrifuge et périphéraliste.