loader

›  « Vote blanc » et machines à voter en France : quand la touche « Vote blanc » formalise l’informel (1969-2014).

« Vote blanc » et machines à voter en France : quand la touche « Vote blanc » formalise l’informel (1969-2014).

  • Moualek, Jérémie (Université d’Évry)

Abstract

À rebours de certaines prénotions, la mise en place des machines à voter en France n’est pas très récente. Instauré par la loi du 10 mai 1969, ce dispositif demeure pourtant une innovation qui n’a pas su s’étendre1 et qui peine à encore aujourd’hui à prospérer, malgré les évolutions techniques. Passée de « mécanique » à « électronique » en 2003, la machine à voter est, en 2014, utilisée par 64 communes (1352 bureaux de vote).

En dépit de cet échec quantitatif, cette instauration impliquant la présence d’une touche « vote blanc » pour l’électeur, offre une première traduction « matérielle » au « vote blanc » (la mise à disposition de bulletins blancs officiels étant interdite). De même, la machine ne pouvant enregistrer que des votes réguliers, le « vote nul » disparaît (la surcharge du bulletin de vote étant rendu impossible). Laissant place à la seule catégorie « vote blanc », la machine l’autonomise de façon « concrète ». Le développement d’un « vote électronique 3» ne fait d’ailleurs que renforcer cet état de fait : le vote par correspondance électronique (par « internet ») mis en place en 2003 (pour l’élection des membres du Conseil supérieur des Français de l’étranger) et étendu en 2011 (pour l’élection des députés élus par les Français établis hors de France) et 2013 (pour l’élection des conseils consulaires), permet – lui aussi – de « voter blanc » de manière effective.

Dès lors, dans quelle mesure la mise en place du vote électronique a-t-elle contribuée à l’imposition progressive du « vote blanc » en tant que pratique plus légitime et différenciée du « vote nul » ? Et, la présence d’une touche « vote blanc » a-t-elle un « effet d’entraînement » sur les chiffres du « vote blanc » ?

Afin de répondre à ces questions, nous mettrons en oeuvre deux approches distinctes.

– D’abord, une approche socio-historique : il s’agira, à travers un corpus constitué d’archives juridiques, parlementaires et d’archives de presse, d’étudier comment la dématérialisation du vote, au-delà de formaliser la pratique du « vote blanc », est une évolution qui s’inscrit dans le « processus d’objectivation sociale 5» dont le « vote blanc » est l’objet depuis les débuts de la Ve République. Et ce, au détriment d’un « vote nul », toujours appréhendé comme une forme d’anti-vote.

– Enfin, une approche statistique : il s’agira d’étudier l’ampleur du « vote blanc » dans les communes équipées de machines à voter entre 1998 et 2015 (15 scrutins différents), en comparaison avec des communes usant du vote par bulletin papier. Cette observation statistique nous permettra d’appréhender la réaction de l’électeur face à cette innovation démocratique.