loader

›  Who rules whose rules ? Ingérence allochtone et préférence autochtone dans la détermination de l’offre linguistique légitime dans le nord de la France

Who rules whose rules ? Ingérence allochtone et préférence autochtone dans la détermination de l’offre linguistique légitime dans le nord de la France

  • Ghillebaert, Christian-Pierre (CERAPS, Université Lille 2)

Abstract

L’ingérence du pouvoir politique dans le paramétrage des productions linguistiques s’observe principalement à trois niveaux : détermination monopolistique des normes linguistiques pour certaines pratiques sociales (e.g. langue de l’administration), recours à la force publique dans la diffusion desdites normes (e.g. scolarisation obligatoire dans une langue), usage de fonds publics pour cette diffusion (e.g. financement d’institutions régissant la langue). Incidemment, cette ingérence n’exclut pas la possibilité d’une action concertée entre plusieurs Etats souverains, comme dans le cas d’une langue identique pour des pays distincts, avec un éventuel degré d’autonomie « nationale » dans la « réglementation » territorialement circonscrite de la langue partagée extraterritorialement.

Le néerlandais standard offre un bel exemple de concertation interétatique, puisque l’Algemeen Nederlands (AN), langue officielle de deux régions de Belgique, des Pays-Bas et du Surinam, est pris en charge, depuis 1980, par la Nederlandse Taalunie (NTU). Cette structure de coopération internationale sert d’assistance technique pour les politiques linguistiques, est l’autorité compétente pour les normes linguistiques, offre un soutien logistique à l’expansion de la langue (notamment pour le développement de l’enseignement du néerlandais).

Or, dans la partie septentrionale du département du Nord, une forme locale du flamand-occidental, reconnu « langue de France » par le rapport Cerquiglini (1999), est enseigné comme « langue régionale flamande » (LRF) dans quelques établissements scolaires. Dès lors se pose une question éminemment complexe : qui est légitimement compétent pour y constater les pratiques linguistiques effectives dans leur normativité spontanée propre, les y normaliser et promouvoir, les y décrire comme caractéristiques d’une variété autochtone (ou  d’une variation locale d’un standard allochtone) ? Les décisions ministérielles et rectorales relativement à l’enseignement de l’AN et/ou de la LRF sont subordonnées au traitement de cette question.

Nous présenterons ici une recherche inédite en cours, combinant immersion participante, exploration de réseaux (in)formels, investigation archivale. Nous démontrerons une récente alliance entre diplomates, parlementaires, acteurs associatifs du nationalisme flamand (belge), sur fond d’irrédentisme larvé, pour associer la disqualification de la LRF et le développement de l’AN dans le Nord. Nous analyserons les stratégies politiques diverses des promoteurs de l’AN, tout comme celles, balbutiantes, des défenseurs de la LRF.