Fretel J. et Lefebvre R., « Partis politiques en crise ou crise de la partisanologie ? Réflexions sur les impensés du recours à l’idée de crise dans l’analyse des partis politiques » (ST 3)

Fretel J. et Lefebvre R., « Partis politiques en crise ou crise de la partisanologie ? Réflexions sur les impensés du recours à l’idée de crise dans l’analyse des partis politiques » (ST 3)

Julien Fretel (Université de Picardie, France)

Rémi Lefebvre (Université de Lille 2, France)

Discutant : Lieven de Winter (Université catholique de Louvain, Belgique)

La crise des partis politiques est devenue un prisme légitime à travers lequel les politistes analysent les perturbations plus ou moins fortes que connaissent les formations politiques. C’est une entrée sans doute heuristique pour aborder les problématiques en prise avec les théories du changement social des organisations politiques. Mais par ses usages très souvent relâchés, la « crise » des partis est aussi, tout à la fois, un lieu commun politologique comme une catégorie d’entendement journalistique. Un bref tour d’horizon des travaux récents conduit à reconnaître le succès croissant de cette perspective. Tout se passant comme si l’actualité récente, en France notamment, de l’élection « catastrophique » du président de l’UMP en 2012 à la crise de « régime » du Parti socialiste en temps d’exercice du pouvoir , avait été de très bonnes matières à réflexion en termes de crise. Depuis le début des années 1980, il semble que la thématique de la crise des partis politiques fasse partie des considérations plus générales sur la crise de la représentation politique. Il reste que cette approche que privilégie fréquemment tel ou tel spécialiste mériterait une analyse en profondeur tant les présupposés engagés pour aborder de la sorte le questionnement sur les organisations politiques ne laisse pas d’interroger. Quels sont les causes et les ressorts d’une crise partisane ? A partir de quel niveau de conflictualité peut-on considérer que les organisations politiques sont entrées en crise ? La crise est-elle un signe de déclin, de mutation non maîtrisée ou d’état normal en période d’opposition ? Quelles sont les symptômes de la dite « crise » ? La notion de crise est ainsi l’objet d’un usage aussi itératif que relâché. Cette inflation de ce signifiant flottant qui prospère dans l’essayisme politologique et au-delà, mérite une analyse un peu distante. Fréquemment, analyses et prises de position assimilent crise et déclin, situation critique et mort . Et nul ne sera sans doute étonné de constater que ce prisme « crisologique » n’est quasiment jamais mis en perspective. Or, à y regarder de plus près, il n’est pas douteux que la notion de crise des partis politiques tient largement de l’impensé. C’est de cette réalité intellectuelle et théorique dont nous voudrions nous saisir en vue de contribuer à une meilleure approche des phénomènes de crise politique. Dans un premier temps, nous chercherons à classer et sérier les différentes approches en termes de crise des partis politiques. Pour ce faire, nous nous centrerons sur le cas français afin de faire en sorte que notre objet demeure à taille humaine. La période historique s’étirera des années 2000 à aujourd’hui. Dans un second temps, nous aimerions resserrer la focale pour comprendre quelles théories sont implicitement engagées lorsqu’il est question de traiter de la crise des partis politiques. Enfin, dans une troisième partie, nous chercherons à lancer une discussion critique et argumentée sur ce que pourrait être une situation partisane de crise.

Section thématique 3 : Crise des partis, crise de la démocratie ?
Session 2 : vendredi 11 avril 2014, 13h30-16h00