loader

›  

Europe  

›  Workshop «Use and limitations of the principal-agent model in studying EU politics» : entretien avec Tom Delreux

Workshop «Use and limitations of the principal-agent model in studying EU politics» : entretien avec Tom Delreux

Les 23 et 24 avril derniers s’est tenu à Louvain-la-Neuve le workshop « Use and limitations of the principal-agent model in studying EU politics », soutenu par le GT Europe.

Min Reuchamps, président de l’ABSP, a rencontré Tom Delreux, professeur à l’Université catholique de Louvain, pour évoquer le workshop.

Min Reuchamps (MR) : Quel était le thème du colloque ?

Tom Delreux (TD) : L’idée du workshop était de voir dans quelle mesure le modèle principal-agent, un modèle théorique qui a été souvent appliqué à l’étude des processus décisionnels au sein de l’Union européenne (UE), était toujours adéquat pour mieux comprendre les phénomènes politiques dans l’UE. Étant donné qu’on assiste à une prolifération des institutions, que la situation institutionnelle de l’UE n’est plus si simple, que par exemple dans les années 80 et 90 le modèle s’était développé à un moment où les principals étaient les États membres réunis dans le Conseil qui déléguaient du pouvoir à la Commission et à la Cour de justice comme agents, on voit maintenant des délégations de pouvoir et une autonomie pour les acteurs qui sont beaucoup plus complexes. L’idée du workshop était donc de faire un exercice de stock-taking où on identifie quels sont les défis lorsqu’on souhaite appliquer ce modèle aux nouvelles dynamiques institutionnelles et aux nouveaux processus décisionnels au sein l’UE, où on a de nouveaux acteurs, de nouvelles institutions et où on voit beaucoup plus une dynamique de réseau qu’une dynamique hiérarchique. En d’autres termes, quels sont les challenges conceptuels, analytiques et méthodologiques auxquels font face les chercheurs qui veulent appliquer ce modèle aux études européennes et comment peut-on les résoudre ? Ou bien est-ce que ces challenges ne permettent plus d’appliquer ce modèle et, donc dans ce cas-là, quelles sont les alternatives ?

MR : La question suivante est liée à ces questionnements. Quels sont les grands enseignements tirés du workshop ?

TD : Le grand enseignement est que le modèle principal-agent disons « classique » est encore applicable à certaines questions, à certains cas par rapport au decision-making dans l’UE mais que ce n’est pas le modèle qui peut tout expliquer. Nous pensons que c’est un modèle heuristique qui peut bien expliquer certaines dynamiques politiques, principalement des dynamiques politiques qui sont caractérisées par des relations dyadiques (avec deux acteurs ou deux groupes d’acteurs) qui ont une dimension hiérarchique. Et quand ces deux conditions nécessaires sont remplies, nous pensons que le modèle principal-agent peut nous aider à mieux comprendre deux dynamiques. La première, c’est ce qu’on appelle the politics of delegation, toutes les questions qui sont liées à comprendre pourquoi des acteurs donnent, délèguent des pouvoirs aux autres acteurs, quelles sont leurs motivations, quel est le design institutionnel pour faire ça et pour contrôler tout ce qui se passe avant que la délégation ait lieu. La deuxième dynamique que nous pouvons mieux comprendre, c’est ce qu’on appelle the politics of discretion ou the post-delegation politics ; ce sont des questions qui sont liées à l’équilibre du pouvoir dans cette relation dyadique. Qui a le plus de pouvoir ? L’acteur qui a délégué et qui contrôle ou l’agent qui a reçu de nouveaux pouvoirs et qui a les mains libres ? Pour répondre à ces deux types de questions, le modèle est encore applicable. Mais l’UE connaît à une complexité plus grande avec de nouveaux types d’agents, beaucoup plus de network governance et donc le modèle n’est pas un modèle heuristique qui permet de tout comprendre. Il faut bien être conscient que c’est un modèle utile, mais pour certaines questions seulement.

MR : Une dernière question, quelles seront les suites ?

TD : Avec Johan Adriaensen, qui était à l’époque à la KULeuven et qui est maintenant à l’Université de Maastricht, nous avions préparé un framework paper, sur l’état de l’art de ce modèle et sur les challenges auxquels il fait face. Sur base de cela, on a maintenant préparé une proposition de livre. L’objectif est de publier un ouvrage collectif à paraître fin 2016, début 2017. Ce qui serait bien parce qu’on sera une vingtaine d’années après la parution d’un premier article de Mark Pollack qui est considéré comme le travail pionnier pour l’application de ce modèle à l’UE. Ainsi, dans ce livre, on pourrait répondre aux questions suivantes : Où en sommes-nous ? Quelle est la nouvelle situation ? Quels sont les challenges et comment peut-on les résoudre ? Quelles sont les alternatives ? Et présenter ce livre comme « twenty years after Mark Pollack ».

MR : Merci pour tout ceci et bonne continuation.

2015-06-11, Interview_Tom Delreux_1

2015-06-11, Interview_Tom Delreux_4

2015-06-11, Interview_Tom Delreux_2