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Entretien avec la première lauréate du Prix Xabier Mabille

Lors de son Assemblée générale du 13 mars 2015, l’Association belge de science politique a décerné pour la première fois le Prix Xavier Mabille de la meilleure thèse en science politique. Était éligible pour ce Prix, toute thèse de doctorat en science politique soumise et défendue avec succès auprès d’une institution universitaire en Fédération Wallonie-Bruxelles en 2013 ou 2014. Le jury était présidé par Pierre Vercauteren et composé des membres du comité éditorial de la collection « Science politique » de l’ABSP, Thierry Braspenning, Ludivine Damay, Vincent de Coorebyter, Bérangère Marques-Pereira et Pierre Verjans. Après délibération, il a remis le Prix Xavier Mabille de la meilleure thèse en science politique 2013-2014 à Nathalie Brack pour sa thèse intitulée « S’opposer à l’Europe. Quels rôles pour les eurosceptiques au Parlement européen ? », défendue à l’Université libre de Bruxelles, le 11 janvier 2013.

Min Reuchamps, président de l’ABSP, est allé à la rencontre de la lauréate.

Min Reuchamps (MR) : Tout d’abord, au nom de l’ABSP, j’adresse de chaleureuses félicitations à la première lauréate du Prix Xavier Mabille de la meilleure thèse. Afin d’entrer directement dans le vif du sujet, est-ce qu’en quelques mots tu pourrais résumer la thèse ?

Nathalie Brack (NB) : Oui, avec plaisir. J’étais partie de l’idée que je voulais savoir ce que les députés eurosceptiques faisaient au Parlement européen et comment ils géraient la contradiction entre être opposé à l’Europe et avoir un siège au Parlement européen. Et donc j’ai passé beaucoup de temps à faire des entretiens avec eux, et à analyser leurs activités parlementaires pour établir une typologie des stratégies ou, en d’autres termes, des rôles parlementaires qu’ils développent, et puis pour expliquer pourquoi un député choisit tel ou tel rôle. Enfin, la dernière étape était de réfléchir aux implications de leur présence pour le Parlement et pour l’Union européenne. Et donc là, suite à ma recherche, j’ai défendu l’idée que leur présence et leurs stratégies au sein du parlement sont plutôt un atout qu’un obstacle, à la fois pour la représentativité du Parlement et la légitimité de l’Union européenne, mais à condition que les élites européennes engagent un débat de fond sur l’Europe et acceptent de discuter de certains arguments des eurosceptiques.

MR : Qu’est-ce que le doctorat t’a appris, notamment sur le plan humain ?

NB : C’est assez difficile de synthétiser, c’est une expérience assez unique. Je dirais que la première chose, c’est la discipline parce que la thèse c’est du relativement long terme. Il faut donc apprendre à se mettre des dates limites, à gérer les priorités et les deadlines. C’était quand même un apprentissage quotidien. Deuxièmement, le doctorat m’a appris le travail en équipe. Une grande partie du doctorat est en fait un travail solitaire mais je pense que la recherche se fait aussi de façon collective. Et la collaboration avec des chercheurs de mon propre centre mais aussi d’autres universités est l’élément qui a été le plus enrichissant à la fois au niveau humain et au niveau scientifique. Ça permet d’élargir ses horizons. Et enfin, le doctorat permet d’apprendre progressivement à gérer les ups and downs du processus de recherche, qui je pense ne s’arrête pas après la thèse. J’ai pu compter sur mon entourage : je pense que c’est important quand on fait une thèse de pouvoir compter sur son directeur, sa directrice, ses collègues proches, des amis, etc, qui, au niveau humain, aident à gérer les aspects psychologiques de la recherche.

MR : Une troisième et dernière question est de te demander d’expliquer ce que tu as fait après ta thèse, et ce que tu souhaites faire, devenir à court et moyen terme ?

NB : Quand j’ai fini ma thèse, c’était vraiment au même moment que les deadlines pour les post-doc, du coup je n’ai pas vraiment pris des congés ou de vacances. J’ai postulé à plusieurs bourses et universités, parce que mon objectif est de rester dans le monde académique. Je sais qu’il y a beaucoup de doctorants qui s’interrogent sur le fait de rester ou non dans le monde académique. J’avoue que cela ne m’est pas arrivé à la fin de la thèse, probablement parce que j’avais pris une année de réflexion avant d’entamer le doctorat. Et donc j’étais sûre au moment de déposer ma thèse que je voulais faire un post-doctorat. Cela m’a occupé un certain temps. J’ai décroché une bourse pour aller à Oxford, ce que j’ai fait l’année dernière. Et maintenant, j’ai mon mandat de chargée de recherche FNRS. Sur le plan plus personnel, la fin de la thèse et le fait d’avoir obtenu une certaine sécurité avec les bourses postdoctorales signifiaient que je pouvais enfin partir en voyage (de noces), ce que j’avais postposé pour cause de rédaction. Voilà ce qu’étaient mes projets immédiats après le doctorat et disons qu’à moyen terme, j’espère faire carrière dans le monde académique.

MR : Merci beaucoup et on te la souhaite très longue.

2015-05-05, Photo_Nathalie Brack